Commerce philosophique du grand siècle

Revue de Synthèse, Apr 2001

Frédéric Brahami, Sophie-Anne Leterrier, Anne Auchatraire, Pierre Lurbe, Bruno Neveu, Simone Mazauric

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Commerce philosophique du grand siècle

Un concept subversif apparat : le progrs. De la conciliation, on passe la rpudiation du modle romain. Si le constat d'chec est amer pour l'Italie, il est nanmoins vide de culpabilit. Les temps ont chang, l'homme valeureux ne peut plus compter sur la fortuna. D'un problme thique, la guerre est devenue une question technique. On entre dans une re de slection o la technique brise l'unit des savoirs. Tuer devient un art, dont on parle entre spcialistes. Les diagrammes, dessins et calculs gomtriques s'imposent dans les traits militaires : l'alliance des armes et des lettres a fait long feu. Dans le mme temps, l'art militaire devient un hobby pour les civils : la guerre est un beau spectacle. Il revient en effet l'art de combler l'cart entre l'tre et le devoir-tre, en reprsentant chaque chose, selon Giovanni Paolo Lomazzo, avec l'apparence que commande la raison . - COMMERCE PHILOSOPHIQUE DU GRAND SICLE Ce recueil darticles rpond un problme fondamental et pineux de lhistoire de la philosophie et de lhistoire des ides : selon quelles modalits, et travers quels moyens dexpression, une poque vit-elle son rapport une tradition passe ? Si lge classique invente la modernit, il ne le fait pourtant pas sans se rapporter lAntiquit. Et ce rapport est irrductible lopposition, la rception, la simple utilisation. Plus que toute autre cole de lAntiquit, le stocisme se prte un travail dinvestigation sur ces relations quune poque tisse avec le pass, parce que le stocisme, pendant deux sicles, a imprgn de faon vivante la culture philosophique, littraire, artistique et scientifique. Le recueil couvre tous les champs de la culture, ce qui a pour effet de faire merger la structuration transversale de lpoque par des problmes poss en termes ou selon des schmes stociens. Ainsi Jacques Darriulat montre, dans son tude magistrale sur la reprsentation de saint Sbastien dans la seconde moiti du Quattrocento, comment la virt de Rome ressuscite en ce hros chrtien. De faon gnrale la grande qualit des articles runis tient ce que lon ne sest pas limit reprer la rsurgence de thmes, de motifs, de concepts, qui seraient dposs tels quels dans le corpus moderne. Ainsi, Miguel A. Granada ( Giordano Bruno et la Stoa. Une prsence non reconnue de thmes stociens ? ) montre comment chez Bruno, bien quil ne soit fait aucune allusion au stocisme, le seul auteur cit par Bruno tant Snque, la localisation de ces rares rfrences est dterminante. Dans sa thorie du spiritus comme divinit immanente et matrielle, Bruno est au plus proche dune affinit avec le stocisme. On apprend ainsi que si la prsence du stocisme nest pas immdiatement perceptible chez les auteurs de cette tradition, cest parce quils ont une doctrine de lhistoire de la philosophie qui synthtise des courants trs divers de lAntiquit sous le platonisme. Cest une leon de mthode : sous les tiquettes, il faut apprendre voir le jeu dlicatement articul des concepts appartenant des doctrines en ralit diversifies. Cest aussi la leon de Bernard Joly qui montre, dans son tude sur Physique stocienne et philosophie chimique au XVIIe sicle que, bien que les stociens ne soient jamais cits (parce que les alchimistes reoivent les thses stociennes au travers du corpus hermtique et noplatonicien), ils se servent de doctrines physiques stociennes contre Aristote. Sans mme quils le sachent les alchimistes prennent la Stoa lide de lunit et du dynamisme de la matire. Si ces contributions montrent la prsence du stocisme l o on ne lattendait pas, parce quon ne la voit pas, dautres montrent que sous une prsence trs visible du stocisme, cest tout autre chose qui slabore. Tel est, pour Annie Ibrahim, le sens et la fonction du recours aux Thmes stociens dans les thories du vivant au XVIIe sicle : par le stocisme, est liquid la fois le modle mcaniste et le modle aristotlicien du vivant, ce qui permet davancer les linaments du concept moderne dorganisme. Le stocisme rinvesti produit des effets thoriques davant-garde en science. Avec Descartes et Spinoza, le rapport aux stociens est diffrent : linformation doctrinale des auteurs est manifeste, ainsi que les emprunts de langage. Gilles Olivo ( Une patience sans esprance ? Descartes et le stocisme ) montre comment la morale cartsienne du libre-arbitre na rien voir avec la thorie stocienne du consentement de la volont : la libert cartsienne produit, elle modifie causalement lordre, alors que la libert stocienne tient en ce quelle est traverse par lordre du monde (p. 243). Sur la ncessit aussi la diffrence sinstaure dans lapparente rptition spinoziste : Alexandre Matheron montre dans Le moment stocien de lthique de Spinoza que le point le plus profond de la divergence tient ce que chez Spinoza nous ne pouvons pas vouloir, purement et simplement, que lordre du monde se ralise, parce que la ncessit spinoziste na rien daimable. Il est trs intressant pour lhistorien de la philosophie de lire larticle ddouard Mehl en regard de celui de Gilles Olivo. Car si c (...truncated)


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Frédéric Brahami, Sophie-Anne Leterrier, Anne Auchatraire, Pierre Lurbe, Bruno Neveu, Simone Mazauric. Commerce philosophique du grand siècle, Revue de Synthèse, 2001, pp. 674-688, Volume 122, Issue 2-4, DOI: 10.1007/BF02969549